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Quel avenir pour le dispositif des CEE en 2025 ?

Par Jade DC

Publié le 19/09/2024

Le dispositif des certificats d’économies d’énergie (CEE) est l'un des leviers principaux de la politique énergétique française. Introduit en 2005, il vise à encourager les économies d’énergie à travers un mécanisme de marché. Cependant, à l’approche de 2025, la question de son avenir se pose. Faut-il s’attendre à une réforme profonde, voire à une refonte complète du dispositif ? La Cour des comptes, dans son rapport de juillet 2024, soulève de nombreuses questions sur l'efficacité et la gestion des CEE. Tuco, vous propose donc d'explorer les critiques et les perspectives de ce dispositif clé pour la transition énergétique.

Définition de CEE

Les Certificats d'Économies d'Énergie (CEE) sont un instrument central de la politique énergétique française depuis 2005. Ce dispositif incite les fournisseurs d'énergie à promouvoir des économies d'énergie auprès de leurs clients. Concrètement, les obligés — principalement des fournisseurs d'énergie — doivent réaliser des actions pour réduire la consommation énergétique.

Le dispositif repose sur plusieurs mécanismes, notamment les fiches d'opérations standardisées. Ces fiches définissent les travaux éligibles aux CEE, comme l'isolation des combles ou le remplacement de chaudières. Les actions réalisées doivent être validées pour obtenir les certificats.

Les objectifs pour la cinquième période (2022-2025) sont ambitieux : atteindre 3 100 TWh cumac - l'unité employée dans le calcul des primes CEE - d'économies. Cette période met aussi l'accent sur la précarité énergétique, avec une part importante des économies à réaliser au bénéfice des ménages précaires.

Les CEE encouragent ainsi la rénovation énergétique, tout en soutenant les ménages vulnérables.

Les certificats d'économie d'énergie : un dispositif jugé 'de plus en plus complexe'

Créé en 2005, le dispositif des CEE a pour objectif d’inciter les fournisseurs d’énergie à réaliser ou financer des actions d’économies d’énergie, en particulier dans le secteur résidentiel. Depuis son introduction, il a financé plus d'un million d'opérations chaque année, touchant des secteurs variés comme le logement, l’industrie ou les réseaux. Entre 2015 et 2025, les obligations imposées aux acteurs du marché ont été multipliées par 3,5.

L’efficacité des CEE est indéniable, notamment dans le secteur résidentiel, qui capte 74 % des certificats délivrés. Mais cette montée en puissance s’accompagne d'une complexité croissante. Le dispositif englobe désormais plusieurs objectifs, comme la lutte contre la précarité énergétique, et des programmes annexes viennent bonifier certaines actions, tels que le remplacement des chaudières ou l'isolation des combles.

Les critiques soulevées par la Cour des comptes

Le dispositif des CEE, tel qu'il est aujourd'hui structuré, s'est considérablement alourdi au fil des années. Cette complexité se manifeste à plusieurs niveaux, rendant la gestion du dispositif difficile pour les différents acteurs du marché, qu'il s'agisse des obligés (fournisseurs d'énergie) ou des bénéficiaires (ménages, entreprises, collectivités). Dans son rapport, la Cour des comptes pointe plusieurs dysfonctionnements et critiques sévères à l’égard des CEE :

Complexité croissante 

  • Multiplication des règles et des obligations :

Entre 2018 et 2023, plus de 280 textes réglementaires ont été adoptés pour modifier ou ajuster le dispositif, créant une instabilité réglementaire qui complique la mise en œuvre des opérations d'économies d'énergie. Ces ajustements constants visent à s’adapter aux nouveaux enjeux énergétiques, mais ont pour conséquence de rendre le dispositif peu lisible, tant pour les acteurs que pour les bénéficiaires.

  • Programmes spécifiques et bonifications :

Le dispositif comprend désormais un ensemble complexe de bonifications et programmes spécifiques. Par exemple, des bonifications sont accordées pour certaines actions comme l'isolation des combles ou le remplacement de chaudières à fioul, ce qui a permis d'augmenter le nombre d’opérations. Cependant, ces mesures ont engendré des dérives et des comportements opportunistes, contribuant à l’augmentation des fraudes dans certains secteurs. La diversité des programmes et des conditions d'éligibilité a aussi rendu l'accès au dispositif plus difficile pour les particuliers et les petites entreprises, qui peinent à comprendre les démarches à suivre.

  • Problèmes de traçabilité et transparence :

La Cour des comptes souligne également un manque de transparence et de traçabilité des certificats. Bien que des outils comme la plateforme Emmy aient été mis en place pour faciliter la gestion des CEE, le suivi des économies réalisées reste difficile. La méthode de calcul des économies d’énergie, basée sur des référentiels théoriques plutôt que sur des données réelles, contribue à une certaine opacité, avec une surévaluation des économies d’énergie souvent constatée. Les contrôles effectués ont révélé que les économies théoriques sont parfois surestimées de 30 % par rapport aux économies effectivement réalisées sur le terrain.

  • Multiples intermédiaires :

Le recours à des intermédiaires privés pour gérer la réalisation des travaux et la validation des certificats ajoute un niveau supplémentaire de complexité. Les entreprises du secteur ont souvent du mal à comprendre les étapes nécessaires pour être éligibles aux CEE, d’autant que chaque intermédiaire peut ajouter ses propres critères d’éligibilité ou ses propres délais.

  • Hétérogénéité des coûts :

Les coûts des opérations financées par les CEE peuvent varier d’un fournisseur à l’autre, en fonction des obligations auxquelles ils doivent répondre. Cette hétérogénéité contribue à la confusion chez les consommateurs, qui ne savent pas toujours comment ces coûts sont répercutés sur leur facture d’énergie.

  • Coûts élevés pour les ménages :

Si les fournisseurs d’énergie financent les opérations d'économies d’énergie, ces coûts sont répercutés sur les consommateurs. Chaque ménage contribue, en moyenne, à hauteur de 164 € par an, ce qui soulève des interrogations sur la soutenabilité à long terme du dispositif.

  • Surévaluation des économies d’énergie :

Le rapport de la Cour des comptes indique que les économies réelles sont souvent surévaluées. En 2022 et 2023, les économies étaient surestimées de 30 %, avec des résultats souvent calculés théoriquement plutôt que mesurés en pratique.

  • Fraudes persistantes :

La Cour dénonce la persistance de fraudes, notamment dans le secteur du bâtiment. Les contrôles ont révélé des anomalies dans un tiers des opérations vérifiées, accentuées par des bonifications généreuses qui favorisent des comportements opportunistes.

Perspectives pour l’évolution des CEE en France pour l'année 2025

Le dispositif des CEE est actuellement dans sa cinquième période (2022-2025). À l’aube de la sixième période, la Cour des comptes propose plusieurs pistes pour améliorer l’efficacité du dispositif.

a) Renforcement des obligations pour la période 2026-2030

Le gouvernement envisage un doublement des obligations pour la période 2026-2030, portant les économies d'énergie à atteindre à un niveau sans précédent. Cet objectif s'inscrit dans les engagements de la France en matière de transition énergétique, avec une réduction de 30 % de la consommation énergétique d'ici 2030, conformément aux exigences de la directive européenne « efficacité énergétique ». Cette augmentation des obligations vise à encourager des actions d’envergure dans le secteur résidentiel, mais aussi à soutenir des initiatives dans les secteurs industriel et tertiaire.

b) Simplification du dispositif pour plus d’accessibilité

Un des points essentiels soulevés par la Cour est la nécessité de simplifier le dispositif, devenu trop complexe pour les particuliers et les petites entreprises. Parmi les mesures proposées :

  • Digitalisation accrue : une simplification administrative grâce à une meilleure digitalisation du système, notamment la plateforme Emmy, pour faciliter les démarches des acteurs du marché.
  • Uniformisation des processus : harmonisation des règles administratives et techniques entre les CEE et les autres dispositifs d’aides à la rénovation énergétique pour éviter les doublons et les incohérences.
  • Meilleure communication : le renforcement des efforts de communication auprès des ménages et des professionnels pour clarifier les avantages des CEE et encourager davantage d’opérations de rénovation énergétique.

c) Ciblage renforcé des ménages précaires

Le dispositif « CEE précarité », qui alloue des aides spécifiques aux ménages en situation de précarité énergétique, représente aujourd'hui un tiers des obligations du programme. Cependant, la Cour des comptes recommande un recentrage de cette aide sur les ménages les plus modestes, en utilisant des critères économiques plus stricts. Cela permettrait de garantir que les ménages ayant le plus besoin d’un soutien puissent en bénéficier, tout en maximisant l’efficacité des aides.

d) Renforcement des contrôles pour éviter la fraude

La Cour des comptes insiste sur la nécessité d’améliorer les contrôles du dispositif pour lutter contre les fraudes, en particulier dans le secteur du bâtiment. Elle recommande la mise en place d’un plan d'action structuré, avec des contrôles renforcés, une automatisation accrue et des sanctions plus rapides en cas de non-conformité. Cette mesure est essentielle pour rétablir la confiance dans le système et assurer que les fonds alloués bénéficient effectivement à la transition énergétique.

Scénarios possibles pour l’évolution des CEE

La Cour des comptes propose plusieurs scénarios de réforme pour ajuster le dispositif aux objectifs énergétiques de 2025 et au-delà :

a) Transformation des CEE en certificats d’économies carbone

Un scénario propose de remplacer les CEE par des certificats d’économies carbone. Ce nouveau dispositif permettrait de mieux intégrer les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) dans la politique énergétique française. Le principe serait de mesurer et valoriser non seulement les économies d’énergie, mais aussi la baisse des émissions de CO2. Cette approche aurait l'avantage de mieux aligner les CEE sur les priorités climatiques de la France et de l'Union européenne.

b) Substitution par des fonds budgétaires

Un autre scénario envisage de remplacer le dispositif des CEE par des fonds budgétaires gérés directement par l’État. Cette approche permettrait de mieux maîtriser les coûts et d’éviter certaines dérives observées dans le dispositif actuel. L’État pourrait ainsi mieux orienter les financements vers des projets prioritaires, tels que la rénovation des bâtiments publics ou l’électrification des transports. Cela mettrait fin à la logique de marché qui caractérise les CEE, jugée opaque et complexe par la Cour.

c) Renforcement du ciblage des aides vers certains secteurs

La Cour recommande également de mieux cibler certains secteurs pour optimiser l'impact des financements. Parmi les secteurs prioritaires figurent :

  • Le secteur industriel : encourager les économies d’énergie dans les industries les plus énergivores.
  • Les collectivités locales : soutenir les projets de transition énergétique au niveau local, notamment pour les bâtiments publics et les infrastructures de transport.
  • Les bailleurs sociaux : faciliter la rénovation énergétique des logements sociaux pour améliorer la performance énergétique du parc résidentiel.

Conclusion

Le rapport de la Cour des comptes appelle à une réforme en profondeur du dispositif des CEE. Complexe, coûteux et parfois opaque, ce mécanisme a néanmoins permis de financer d’importantes économies d’énergie. À l’horizon 2025, il semble crucial de repenser le fonctionnement des CEE pour les rendre plus efficaces, accessibles et durables, tout en s’assurant qu’ils répondent aux ambitions climatiques de la France. La question est maintenant de savoir si une réforme progressive ou une refonte complète du dispositif sera choisie pour accompagner la transition énergétique.

Questions / réponses sur les CEE

Pourquoi les prix des CEE commencent-ils à chuter ?

La baisse des prix des certificats d'économies d'énergie (CEE) s'explique par plusieurs facteurs. Tout d'abord, la cinquième période du dispositif a vu une accumulation importante de stock de CEE, ce qui a réduit la demande. De plus, l'absence d'une hausse significative des obligations a contribué à maintenir une offre élevée par rapport à la demande.

Les réformes visant à simplifier le dispositif ont également joué un rôle, bien que leur impact ait été limité. Par ailleurs, la suspension de certains coups de pouce a réduit l'incitation pour de nouvelles rénovations, entraînant une diminution de la production de CEE.

Les acteurs du marché, préoccupés par cette tendance, appellent à des mesures pour stabiliser les prix. Ces ajustements pourraient inclure un renforcement des obligations ou des incitations plus attractives pour encourager davantage de travaux de rénovation énergétique.

Quels sont les obligés ?

Les obligés du dispositif des certificats d'économies d'énergie se composent majoritairement de fournisseurs d'énergie. Ces acteurs incluent des entreprises bien connues telles qu'EDF, Engie, TotalEnergies, et d'autres distributeurs d'électricité, de gaz, et de carburants.

Ils ont l'obligation de réaliser ou promouvoir des actions en faveur de l'efficacité énergétique. Pour se conformer à ces obligations, plusieurs stratégies sont utilisées :

  • Offrir des primes pour inciter particuliers et entreprises à diminuer leur consommation.
  • Acheter des certificats d'économies d'énergie (CEE) sur le marché lorsqu'ils ne peuvent pas remplir leurs obligations par leurs propres actions.
  • Investir dans des projets de rénovation énergétique afin de réduire leur propre consommation ou celle de leurs clients.

Ces mesures visent à encourager des économies d'énergie significatives à travers divers secteurs, tout en soutenant la transition énergétique de la France.

Qui sont les éligibles aux CEE?

Les Certificats d'Économies d'Énergie (CEE) sont accessibles à divers acteurs. Parmi eux, les particuliers, qu'ils soient propriétaires ou locataires, peuvent bénéficier de ces aides pour optimiser l'efficacité énergétique de leur logement.

Les entreprises et industries, en particulier celles du secteur tertiaire, ont également accès aux CEE pour financer des projets d'économie d'énergie. Les collectivités territoriales et des organismes comme l'Agence Nationale de l'Habitat (ANAH) sont aussi éligibles, ce qui leur permet de soutenir des initiatives locales.

Pour être éligible, il est nécessaire de répondre à certains critères, tels que le respect des normes techniques spécifiques ou la réalisation de travaux dans un bâtiment achevé depuis plus de deux ans. Par exemple, un propriétaire souhaitant installer une chaudière biomasse devra s'assurer que le professionnel choisi est certifié RGE (Reconnu Garant de l'Environnement) pour prétendre à une prime.

Ces mesures encouragent une transition énergétique durable et soutenue par un large éventail d'acteurs.

Qui donne le plus de prime cee ?

Pour obtenir la meilleure prime CEE, il est essentiel de considérer plusieurs fournisseurs. Parmi les principaux acteurs, on trouve EDF, TotalEnergies et Engie, qui proposent des montants variables en fonction des travaux et des ressources du demandeur.

Les primes peuvent aller jusqu'à 5 000 €, notamment pour les foyers aux revenus modestes. Les travaux éligibles incluent l'isolation thermique, le chauffage et les énergies renouvelables. Il est souvent conseillé de réaliser des devis auprès de plusieurs fournisseurs pour maximiser le montant de la prime.

Certains distributeurs, comme Leclerc ou Auchan, offrent également des primes énergie sous forme de cartes cadeaux, couvrant jusqu'à 35 % du coût des travaux. Pour optimiser votre choix, comparez les offres disponibles et choisissez celle qui correspond le mieux à votre projet de rénovation.

Quand se termine la prime cee ?

La prime CEE est garantie jusqu'au 31 décembre 2025, marquant la fin de la cinquième période des Certificats d'Économies d'Énergie. À l'issue de cette période, le dispositif pourrait connaître des ajustements, mais aucune interruption n'est envisagée actuellement, car cette aide reste cruciale pour la transition énergétique en France.

Les professionnels et les particuliers peuvent donc planifier leurs projets de rénovation énergétique en tenant compte de cette échéance. Les travaux éligibles peuvent inclure l'installation de systèmes de chauffage performants ou l'isolation de bâtiments.

À l'approche de 2025, il est recommandé de suivre les annonces officielles concernant la sixième période des CEE pour anticiper les évolutions possibles. Les bénéficiaires doivent s'assurer de respecter les critères d'éligibilité actuels pour maximiser le montant de leurs primes.

Est-ce que ma prime renov' sera reconduite en 2025 ?

À partir du 1er janvier 2025, MaPrimeRénov’ sera effectivement reconduite, avec plusieurs modifications qui pourraient profiter à de nombreux ménages. En 2025, les plafonds de financement pour certains foyers seront augmentés, facilitant l'accès à cette aide.

Les ménages aux revenus intermédiaires et supérieurs pourront cumuler MaPrimeRénov' avec d'autres aides, telles que le Prêt à Taux Zéro (PTZ). Ce cumul permettra de réduire significativement le reste à charge lors des travaux de rénovation.

Pour optimiser le montant des aides, il est crucial de bien préparer son projet et de se faire accompagner par un conseiller France Rénov’. En outre, le recours à un accompagnateur Rénov’ sera obligatoire pour les rénovations d’ampleur, assurant ainsi un suivi rigoureux et efficace des travaux.

Cette reconduction et ces ajustements visent à encourager davantage de propriétaires à améliorer l’efficacité énergétique de leur logement.

Qu'est-ce que les CEE précarité ? 

Les CEE précarité sont spécifiquement conçus pour venir en aide aux ménages en situation de précarité énergétique. Ces certificats visent à alléger les dépenses énergétiques des foyers les plus modestes, qui consacrent souvent une part importante de leur budget à l'énergie.

Le dispositif se traduit par des primes bonifiées pour certains travaux de rénovation, comme l'isolation thermique ou le remplacement de systèmes de chauffage obsolètes. Les bénéficiaires peuvent profiter d'un soutien accru en fonction de leurs revenus.

Pour être éligible, un ménage doit répondre à certains critères de ressources. Les aides sont calculées selon une méthode spécifique, tenant compte des objectifs nationaux en matière d'économies d'énergie.

Exemple concret : une famille remplaçant une chaudière au fioul par une pompe à chaleur pourrait bénéficier d'une aide significative, réduisant ainsi sa facture énergétique et améliorant son confort.